Grandeur et décadence des glaciers...

Les glaciers rétrécissent, la banquise fond, la planète se réchauffe, vite, vendez vos 106 diesel de 1996 et 900 kg pour des Toyota Prius nucléaires de 2 tonnes, vous sauverez la planète en allant chercher les gosses ! Tant pis si vous vous endettez pour 30 ans ! Au delà de cette petite pique envers nos amis fin-du-mondistes, force est de constater que la haute montagne est le témoin "privilégié" du réchauffement climatique qui est aussi indiscutable que la psycho-rigidité de Kim Jong-Un...

L'arête NE de Gioberney, jolie petite course variée, avait été choisie en juillet 2001 par votre serviteur, alors en fin de convalescence d'une opération de l'épaule, pour son retour en montagne. Un petit solo doublé d'une bonne bavante, rondement menés à la journée depuis Grenoble, pour fêter son quart de siècle à l'époque... 

18 ans plus tard jour pour jour, j'y emmène une cliente bien connue pour fêter l'événement...

Voici un petit panorama au fil du temps. Les montagnes, et les visages, ont changé...

A noter de belles rencontres au refuge avec entre autres des randonneurs venus du bout du monde, des collègues estimés et connus comme Pierre, de la Grave, et Matthieu, d'Aussois, aspi presque médaillé que j'ai rencontré à l'occasion avec qui j'ai bien accroché. Vive la vie de refuge pour ces moments de partage !

Pour finir, petit coup de gueule à l'encontre du CAF de je ne sais-où (PACA il me semble) qui a bien foutu le bordel au refuge et dans les voies aux alentours. Ils étaient par exemple pratiquement une vingtaine dans notre itinéraire. Bon. Levé à 4h comme tout le monde et ne souhaitant finalement pas faire la course dans la nuit alors que ma cliente est un avion acclimaté, je me recouche pour partir au jour à 6h30, et laisser filer les fédéraux. Ainsi ne nous gênerons nous pas mutuellement...

"Ils seront très rapides, on les a bien formés, en plus j'ai fait l'itinéraire au moins 20 fois je connais par coeur" m'assure un "instructeur" à l'égo et aux certitudes aussi surdimensionnés que son bide... Cet Ueli Steck de banlieue au demeurant pas méchant s'était permis, ai-je ensuite appris, de donner la leçon à un émérite professeur de l'ENSA, présent au refuge ce soir là, sur sa façon de gérer la traversée du glacier... Tout un poème. Au moins nous a-t-il bien fait rire.

Bref, résultat, en partant 2 bonnes heures après le troupeau en espérant ne jamais le revoir sur une course assez courte, j'ai doublé l'intégralité de la chenille processionnaire avant le bastion final. Un peu plus de 2h refuge/sommet pour moi, soit au bas mot 2 fois plus rapide que les "fusées" CAFistes. Ce n'est pas un chrono, ce n'était pas l'objectif, et je ne trouve là aucun mérite. Je souhaitais juste avoir un trafic fluide pour que la course soit un plaisir pour tous, y compris pour ma cliente qui n'avait pas forcément envie d'attendre 1h ou davantage derrière une file de gugus pour négocier un petit ressaut vertical.

Cependant, un autre "instructeur", qui valait lui aussi son pesant de mousquetons, n'a pu s'empêcher de baver dans mon dos auprès de ma cliente lorsque j'avalais les 20m techniques menant au sommet. Quand on voit les "enseignements" truffés d'âneries qu'il prodiguait à ses stagiaires, on a vite fait de comprendre que les "fédérastes" perclus de certitudes, mal équipés, aux techniques approximatives et souvent inappropriées et gauches ont encore de beaux jours devant eux. Je plains le collègue qui supervisait tout ça et qui semblait dépité !

Bref, messieurs/dames de la FFCAM, vous avez commencé à bien moderniser votre vénérable structure avec des groupes dynamiques et des projets jeunes et de grande classe (GEAN, Lead The Climb, Camp4, etc...), continuez avec la "base" pour dépoussiérer les programmes montagne, ça ne sera pas du luxe ;)

Les Bans encore frappés des rayons chauds du soleil, le reste du cirque déjà plongé dans l'obscurité... On se prend à penser à d'anciens topos qui décrivaient: "sortir du refuge, prendre pied sur le glacier". Aujourd'hui, avec 200m de dénivelée, la marche est bien haute !
Dans le lointain, le Rateau et la Meije...
Les mêmes, 18 ans plus tôt, jour pour jour...
Nathalie s'extrait du scrambling "gris clair" en un éclair pour prendre pied sur l'arête ensoleillée 
Votre serviteur fait bronzette, il fait doux en cette belle matinée...
Sa majesté les Bans... Le couloir Nord gravi avec Max et Matt en 2000 fait grise mine !
Les montagnes n'ont pas bougé, la glace, si !
Ambiance matinale d'une grande pureté, à peine troublée par un hélico de secours tournant autour de la Barre...
Nathalie à l'approche de la dernière longueur, ayant dépassé la figure de proue de la chaînette fédérale...
20m de belle fissure en 4, sympathique escalade sur du beau caillou
Quelques mètres sous le sommet, en 2019...
... ou en 2001 !
Les Bans, le Sirac, les seigneurs des Ecrins Sud !
Le (presque) vieux guide et sa cliente, gueules burinées...
... ou le jeune chien fou et sa bouille pouponne, au choix !
La Pointe Richardson et le glacier du Gioberney en 2019...
... les mêmes presque 20 piges plus tôt 
Descente par la vn, surplombant le refuge à la fin. Quel bel endroit !

Le bel alpinisme classique pour thérapie...

Etre tenu éloigné des cimes pendant longtemps provoque des effets secondaires indésirables chez les alpinistes, ou prétendus tels. Je n'échappe pas à la règle: énervement, manque de recul sur le monde, sentiment d'inutilité, de non appartenance... bref les prémices indiscutables de ce qu'un employé de France Telecom appellerait sans aucun doute une grave dépression...

Pour remédier à cette longue descente aux enfers comparable au choc que subit ce même employé en apprenant qu'il va devoir passer de 28 à 35h hebdomadaires, une seule solution: retourner en montagne! Et le ciel s'éclaircit subitement !

Un mois à peine après ma seconde opération du genou, ça va plutôt bien. Ma fidèle cliente Nathalie, qui était là lors des crunch méniscaux qui m'ont diminué/arrêté presque un an, est la compagne de cordée toute trouvée pour regagner la haute montagne.

L'oxygène rare et le milieu qui s'y rattache permettent de se repaître de sensations pures et authentiques: la faim, la soif, le sommeil, la tension (sans forcément aller jusqu'à la peur). Ces signaux ont une ampleur toute particulière loin du confort rassurant de la cité.

Une course en montagne commence souvent par la petite inquiétude chronique quand sonne le réveil au tréfonds du dortoir moite d'une cabane perchée, alors que la nuit a encore de longues heures devant elle...

Florilège de jolies courses classiques qui m'ont permis de (re)devenir un homme meilleur en me faisant évoluer dans un environnement pur et puissant...

La haute montagne résumée en une image... Le Gornergletscher sur fond des 4000 Valaisans
Un sac, une corde, une (belle) montagne: la base !
Les couleurs de l'aube...
La rimaye en face Nord de la brèche de la Meije
Un bon look de débilos pour débuter ces nouvelles aventures !
L'arête NE du Rateau E, un superbe itinéraire sauvage made in Oisans
Nathalie se rétablit sur l'arête depuis le glacier au prix d'une longueur "corde à noeuds" bien raide
La Reine nous surveille... L'ami Thierry Vescovi, du bureau de Méribel, y est accroché quelque part au même moment !
Vue vers le Sud, magique !
En Nord, on distingue le village de la Grave, loin, très loin...
Contraste saisissant avec le retour à la vie "d'en bas" au vallon de la Selle
Pause café incontournable après une nuit au refuge de la Selle où l'orage nous a cueillis !
Un peu de joli caillou à la tête de la Maye, une première pour Nathalie
Je n'avais pas grimpé là-bas depuis 15 ans au bas mot, c'est toujours aussi beau !
On bascule en haute montagne à nouveau, direction le refuge Quintino Sella dans les Mont Rose. Le bellâtre vieillissant a un petit quelque chose de Damien Fillon vous ne trouvez pas ?
Les cordes sécurisant l'arête menant au refuge depuis Staffal
En route vers le Castor !
La très belle arête SE du Castor, munie d'une bonne trace
Nathalie arrive au sommet du premier des jumeaux
De belles crevasses un peu partout sur ces glaciers géants
Le lendemain, départ pour une course bien plus sérieuse: la mythique et sublime traversée du Liskamm...
Premières arêtes effilées pour arriver au mur raide qui sera tout en neige, modulo 50m de glace dans le haut
Panorama unique: Cervin, Obergabelhorn, Zinalrothorn, Weisshorn, etc...
Il fait très froid avec le vent qui souffle sans ménager sa peine, l'onglée guette...
L'ami Thierry Pastore ("amicu Pastore" pour les fans des Surghjenti...) et son client, dans le froid matinal
On quitte la face raide pour débarquer sur l'arête menant au sommet W. Le soleil nous y attend, pas la chaleur !
Depuis le sommet W, un aperçu de ce qu'il reste à parcourir... Une belle arête tantôt rocheuse, tantôt neigeuse, où la concentration doit rester maximale... Au total 2.5km de difficultés
Nath dans les rochers, facile !
Le sommet E, à 4527m. Au loin à gauche, le Signalkuppe et le refuge Margherita où nous sommes attendus. Il reste un peu de chemin, et surtout une descente technique 
Course rondement menée, on a le sourire !
Jolis séracs à la descente du sommet E
La face N du Liskamm, ourlée de la plus belle course d'arête neigeuse des Alpes, que l'on vient de terminer
Petite, mais costaude ! Celle là est sans fin !
Rifugio Margherita, 4559m, le plus haut d'Europe. Notre belle acclimatation nous permet d'y passer un séjour dénué de tout inconfort hypoxique
Coucher de soleil grandiose...
... on ne s'en lasse pas !
Réveil "en terrasse", mais pour le petit dej, on rentre à l'intérieur !
Mise en jambe avec le Zumsteinspitze, à proximité du refuge
Nathalie au sommet, 4563m, son plus haut après le Mont Blanc
Petit moment de contemplation au lever du jour...
Sommet de la Pyramide Vincent, un dernier 4000 pour la route, que ces glaciers sont beaux ! Puissent nos enfants profiter de leur beauté avant qu'ils ne fondent (et/ou ne s'effondrent) complètement...
Le glacier du Lis, blindé de pots monstrueux !
Rifugio Cità di Mantova, 3500m: le temps d'un bon café, on est en Italie bordel ! Et maintenant, un jour de repos bien mérité après de belles journées entre ciel et terre !